2001 Odyssée de l'espace

 

 

 


Réalisateur : Stanley Kubrick
Acteurs principaux : Keir Dullea, Gary Lockwood
Epoque : ensemble de l'histoire de l'humanité
Lieu : indéfini

Style : philosophie

Histoire : Au commencement de l'humanité, une tribu d'hommes préhistoriques découvre un monolithe noir et rectangulaire émettant une aura inquiétante. Les premiers hommes tombent bientôt en adoration devant cette découverte insolite et l'un d'entre eux s'en inspire pour créer le premier outil : l'homme vient de naître. 4 millions d'années plus tard, en 2001, le Docteur Floyd part pour la Lune où un monolithe semblable vient d'être découvert, mettant en émoi toute la communauté scientifique. 18 mois plus tard, après avoir décelé que le monolithe émettait des signaux en direction de Jupiter, un groupe de spationautes fait route vers la planète géante pour approfondir la question. Ils sont dirigés par HAL, ordinateur ultra-perfectionné qui contre toute attente souffre bientôt d'une défaillance technique.


Verdict :

Scénario : quelle tâche monumentale que d'aborder le scénario de 2001. Tout d'abord, il convient de poser ce film dans la carrière de Kubrick : il a été réalisé en 1968, soit trois ans avant Orange mécanique. Ces deux films sont complémentaires et indissociables, bien que radicalement opposés dans leur forme. Kubrick, avec ces deux films, a tout simplement fait le tour de la question de l'Homme. Dans 2001, il appréhende l'homme sur toute son histoire, c'est-à-dire qu'il l'appréhende de la façon la plus étendue. Plus tard dans Orange mécanique, il abordera l'homme de la façon la plus individualiste, en développant au maximum les faces cachées du cerveau d'Alex. Il étire dans le premier et concentre dans le second. Mais alors que retenir de la réflexion de Kubrick dans 2001? Le film est savamment découpé en quatre parties.
On a d'abord l'aube de l'humanité. Le monolithe est en réalité le symbole de l'humanité. Sa découverte coïncide avec l'invention du premier outil et donc le passage de l'animal à l'humain. On se retrouve ensuite projeté à ce que Kubrick imagine être "l'apogée" de l'homme, en 2001 (vision pas si optimiste que ça comme nous allons le voir). La deuxième partie concerne l'arrivée du docteur Floyd sur la Lune, la découverte du monolithe, tout le mystère qui s'en échappe, à la fois pour les personnages et pour le spectateur (que fait-il ici alors qu'il était sur Terre du temps des hommes préhistoriques?). C'est en fait simplement que le destin de l'homme s'éloigne de la Terre, part dans l'espace, et même plus loin que la Lune car le monolithe émet des ondes vers Jupiter.
Commence alors la troisième partie, avec le voyage vers Jupiter. Le centre des préoccupations n'est plus ici le monolithe mais l'arrivée du "personnage principal" : HAL, l'ordinateur surdoué. HAL se révèle être plus humain que les deux spationautes qui l'accompagnent, car il est le seul à s'inquiéter de cette mission et ses répercutions. On se surprend à penser que les deux spécialistes, austères, ne parlant quasiment pas, sont moins humains que HAL. Il faut y voir une peur de voir la machine supplanter l'homme : où allons nous si l'ordinateur se met à avoir des sentiments? Ainsi, après avoir expliqué le début de l'humanité, (et décrit son apogée dans la deuxième partie) Kubrick nous dévoile ce qu'il considère comme sa fin : l'intelligence artificielle.
La quatrième partie, enfin, se veut optimiste. L'un des deux spationautes a déconnecté HAL qui prenait trop d'initiatives et se retrouve précipité au-delà de l'infini. Après une transition psychédélique, le voilà à l'intérieur de sa propre conscience, assistant à son propre vieillissement avec impuissance. Enfin, arrivé à l'état de vieillard, il renaît en tant que fœtus dans l'espace et se tourne vers la Terre. Cette renaissance symbolique, encore liée au monolithe, exprime le fait que l'humanité peut aller au-delà d'elle-même et atteindre un stade supérieur comme l'avaient déjà fait les hommes préhistoriques au commencement.
Bref, vous l'aurez compris, aucun scénario n'a jamais égalé cette œuvre de réflexion philosophique, qui a ni plus ni moins couvert l'Humanité avec un grand H.

Jeu des acteurs : Va-t-on s'attarder sur des performances d'acteurs? Relativement inconnus, totalement impersonnels dans leurs rôles, ils font leur job avec sobriété, comme il en était question pour ce film. Ils peuvent se féliciter d'avoir participer à ce grand film.

Réalisation : En adéquation parfaite avec l'ambition du scénario. En dehors du fait que les effets spéciaux étaient remarquables pour l'époque, et ne vieillissent toujours pas, on remarquera une symbolique incroyablement développée et apte à être interprétée de manière très différente par chaque spectateur. Les décors surtout sont parfaitement expressifs : vaisseaux tournoyants suggérant la valse des sentiments entre HAL et les spationautes, aridité sauvage des plaines préhistoriques, blancheur irritante des intérieurs spatiaux, des vaisseaux qui s'imbriquent comme pour une fécondation. Le grand reproche fait à ce film est sa lenteur : en effet, les scènes d'espace notamment, sont incroyablement lentes. C'est irritant au début. Il est fortement décommandé de regarder ce film dans un état de fatigue ou si on a pas envie de se prendre la tête. Sinon on va obligatoirement tomber de haut. Puis lorsqu'on a compris que l'intérêt du film n'est pas là, on se délecte. Ce film n'a aucun but divertissant. Ce n'est pas du spectacle, c'est de l'art. Et l'art n'est pas fait pour être efficace ou divertissant. Que ce soit dans la lumière, l'ambiance, l'atmosphère, les décors, les symboles, la réalisation est sublime. A retenir également, l'utilisation géniale de la musique, des airs de classique qui sont rentrés dans l'histoire, ou encore des trouvailles visuelles impressionnantes, tant dans l'espace qu'à l'intérieur des engins spatiaux. Kubrick a sans doute signé un de ses plus gros films au niveau de la pure réalisation technique, sans parler de mise en scène.